Les ESPE ont par nature vocation à être des acteurs de la stratégie de l’enseignement supérieur, à la fois par leur rôle dans la formation des professionnels de l’enseignement scolaire, mais aussi par celui qu’elles pourront jouer pour participer à la transformation pédagogique dans le supérieur. Dans l’idéal – un idéal qui est parfois déjà un projet très concret et qui était l’ambition initiale assumée clairement par la loi qui les a instituées – elles pourraient devenir un espace de rencontre entre les acteurs de la formation et de la recherche sur les questions d’éducation de la maternelle à l’enseignement supérieur, et tout au long de la vie. Elles devraient être des structures ouvertes et perméables capables de réunir les équipes de recherche qui apportent chacune leur pierre à l’édifice de compréhension des processus d’apprentissage, les pionniers de l’innovation pédagogique, les centres de développement pédagogique. Elles pourraient ainsi devenir le creuset d’une démarche interdisciplinaire, réflexive, collective et constante sur ce que veulent dire apprendre et enseigner au xxi e siècle et sur les mutations que le numérique entraîne dans l’appropriation et la coconstruction de savoirs ouverts à tous, tout au long de la vie. C’est aussi dans cette perspective que les ESPE permettraient de reconnaître plus explicitement encore le rôle des enseignants auprès des élèves, des étudiants et plus largement dans la société. Car le métier d’enseignant est un métier à responsabilité où chacun doit sans cesse prendre des décisions et adapter de façon permanente ses pratiques en fonction des élèves, des objectifs ambitieux qu’il leur donne, des problèmes qu’il repère et analyse. Placer tous les enseignants et enseignants-chercheurs dans une démarche réflexive de recherche- action est un moyen de transformer la pédagogie et de contribuer à l’élaboration des savoirs sur l’apprentissage. La formation des enseignants doit donc être conduite par la recherche et avec la recherche, pour faire de chaque enseignant un chercheur de solutions face aux situations d’apprentissages des élèves et – demain – des étudiants. Ainsi, les ESPE joueraient aussi un rôle essentiel dans le rapprochement du lycée et de l’enseignement supérieur, le partage entre les enseignants-chercheurs et les enseignants des lycées d’une culture commune mais aussi d’un projet commun pour élever les qualifications, aider chacun à la réussite et favoriser la mobilité sociale. Mais l’idéal n’est pas toujours au rendez-vous et il faudra une volonté politique forte et une capacité d’ouverture au changement tout aussi grande des équipes des ESPE et des enseignants-chercheurs du supérieur pour permettre aux ESPE de jouer ce rôle essentiel dans la transformation de notre éducation, de notre pédagogie, et pour lutter contre les excès de l’élitisme de notre système et des inégalités sociales qu’il produit.